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15 juillet 2015 3 15 /07 /juillet /2015 13:05

Pour le culte des confirmations des années précédentes, j'ai toujours pris un personnage de la Bible comme référence. Le plus souvent des femmes – la Samaritaine, Marie de Magdala, Marthe et Marie… – d'abord parce que ces personnages féminins, moins commentés, sont souvent superbes, et puis parce que, c'est ainsi, les filles étaient plus nombreuses parmi les catéchumènes.

Cette année, c'est l'inverse ! N'est-ce-pas Laetitia ? Seule face à cinq garçons, tu as été très courageuse…

Alors cette année, ce sera un homme : Jean le Baptiste, habituellement raccourci en ‘Jean-Baptiste’.

Lisons donc ce qui nous en est dit, au tout début de l’Évangile, avant que Jésus ne fasse quoi ce soit : Matthieu 3 : 1-17.

Drôle de bonhomme ce Jean le Baptiseur.

Baptiseur veut dire « plongeur » : pas dans l’océan, mais celui qui plonge les autres dans l'eau pour les purifier. En un mot, qui les baptise…

Oui, drôle de bonhomme : vivant dans le désert, vêtu de poils de chameau et d'une ceinture de cuir, se nourrissant de criquets et de miel, et engueulant les gens qui venaient pourtant à lui…

On se dit qu'à l'époque ce devait être possible… Mais non ! Les gens étaient civilisés : l'époque est celle du sommet de la puissance et de la gloire de Rome, pas celle des cavernes. Et ce gaillard étonnait alors autant que si vous ou moi venions aujourd'hui en poils de chameau et ceinture de gros cuir, avec un cornet de sauterelles au miel dans les mains ; et qui plus est, avec des menaces plein la bouche…

Cela nous fait sourire, mais à l'époque son charisme et son autorité étaient tels qu'on ne rigolait pas… Et lui ne rigolait pas non plus : « Race de vipères ! » jette-t-il à la figure des groupes de gens plus ou moins religieux qui ont quand même fait le déplacement au désert pour venir l'écouter… C'est que Jean-Baptiste, comme Jésus plus tard, ne supporte pas l'hypocrisie, surtout pas religieuse.

Sommes-nous des vipères ?

Sans doute, quand nous pratiquons la fraude fiscale,

quand nous vendons des produits « bidons » ou piratés, ou même nocifs,

quand nous grillons un feu rouge ou remontons un sens unique en scooter,

quand nous parlons avec colère ou mépris à notre conjoint ou notre copine,

quand nous ridiculisons un copain, un collègue ou un prof…

C'est cela que Jean le Baptiseur nous crie, et Jésus aussi, puisqu’en demandant son baptême à Jean, Jésus s'inscrit dans la tradition et la protestation que Jean-Baptiste représente. D'ailleurs Jean le dit lui-même: « Moi, je vous baptise d'eau, mais Celui qui vient après moi – Jésus en fait – vous baptisera, lui, d'Esprit Saint et de feu. Il a sa fourche à la main, il recueillera son blé, mais il brûlera la paille dans un feu perpétuel… ». Ouf !

Parce que, oui, Dieu est Dieu. Dieu peut exiger. Dieu attend beaucoup de nous, de vous. Simplement, de sa part, ce n'est pas un ordre, c'est une marque de confiance et un espoir. Un espoir en vous.

Mais ce baptême de Jésus par Jean le Baptiste, dit aussi autre chose. Leur petit débat, entre Jésus et Jean :

« Tu me baptises.

– Non, c'est toi !

– Non, c'est toi, c'est plus juste. ».

C'est compréhensible, mais surtout essentiel.

Ce que Jean comprend immédiatement, c'est la différence infinie entre lui et Jésus.

Lui, Jean, n'est qu'un messager, un porte-parole de Dieu. Il représente la foi, et il représente la Loi, celle de Dieu. Mais sa personne elle-même n'a pas beaucoup d'importance, et elle va d'ailleurs disparaître, assassinée.

En revanche il comprend que, en Jésus, celui qui se tient là devant lui, vivant et parlant, c'est Dieu Lui-même. Dieu qui est descendu sur terre dans cet homme-là. Et Jean, le premier, peut affirmer publiquement : « Oui, Jésus est le Christ, celui que j'attendais. »

Mais que s'est-il donc passé ce jour-là, à ce moment-là, ce moment précis, sous les yeux de Jean le Baptiseur ? Quelque chose de jamais vu, presque une déflagration : un homme se donne à Dieu, totalement, il met tout son être, toute son intelligence, son corps, sa vie, à la disposition de Dieu. D'autres étaient déjà venus voir Jean-Baptiste : ils voulaient juste un petit nettoyage de conscience. D'autres, des hommes, des femmes, déjà avant Jean-Baptiste, avaient déjà tout donné à Dieu. Et d'autres le feront encore par la suite.

Mais ce qui est unique ici, c'est que Dieu a choisi ce jour-là et cet homme-là pour demeurer en lui comme Il n'avait jamais demeuré en personne et comme Il n'y a plus jamais demeuré. Ce jour-là, devant les yeux de Jean-Baptiste, Dieu adopte Jésus, Dieu fait de lui son Fils, Dieu s'introduit et occupe entièrement toute la personne de Jésus.

Et c'est vraiment une déflagration dit la Bible, puisqu'elle décrit le Ciel qui se déchire, une voix de tonnerre qui proclame : « Celui-ci est mon Fils bien aimé », et une colombe, symbole de l'Esprit de Dieu, qui vient se poser sur Jésus…

De ce jour, cet homme, Jésus, dans tout son être, toute son intelligence, tout son corps, toute sa vie jusqu'à en mourir, sera le visage de Dieu sur terre.

Mais la condition à cela, c'est que Jésus ait fait le premier pas, qu'il soit allé à la rencontre de ce drôle de bonhomme, Jean le Baptiseur. Pour s'offrir à Dieu. Ensuite Il a pu parler, agir, guérir, prier, aimer jusqu'à en mourir et ressusciter, parce que Dieu était en lui.

Et la condition de cette condition, c'était que Jean le Baptiseur soit là, ait lui aussi tout donné, pour être ce représentant de la foi devant lequel Jésus est né comme Fils unique de Dieu.

  • Jean-Baptiste est celui qui a permis au Christ de naître en Jésus.
  • Jésus est celui qui a permis à Dieu de naître en tous ceux et celles qu'Il a touchés.
  • Et tous ceux et celles qu'Il a touchés de son vivant jusqu'à aujourd'hui sont ceux qui ont permis à Dieu, au Christ, à l'Esprit de Dieu, de naître en chacun de nous.

Et vous, si aujourd'hui vous entrez dans cette longue transmission, vous serez vous aussi de ceux qui permettent à Dieu, au Christ, à l'Esprit de Dieu, de naître chez d'autres, chez certains de ceux et celles que vous rencontrerez… Car vous l'avez compris : c'est à vous six que Jésus transmet cela. A vous six, par delà les 2000 ans qui vous séparent de Lui. Et vous l'avez compris : vous avez raison d'être là ce matin, même si vous n'êtes que six sur les vingt ou trente de votre âge dans notre fichier de paroisse... C'est vous qui avez raison, parce que l'étape décisive pour Jésus, cela a été de s'approcher de Jean le Baptiseur, comme d’un lien avec Dieu, son Créateur. Et de se confier à Dieu, de s'inscrire dans son exigence, d’accepter que Dieu nous demande beaucoup. Accepter qu'Il soit exigeant et attende beaucoup de nous, de vous six.

Ce n'est qu'ensuite que Jésus se tourne vers les autres, vers la vie, et offre tout aux autres, à la vie. Oui, c’est comme une Confirmation.

Alors pour nous, pour vous, il en est de même. Nous pouvons aussi, après nous être confiés en Lui, tout offrir, tout ce que nous avons reçu, tous nos dons, tous vos talents, pour que s'approche le Règne de Dieu.

Vous connaissez le mot de la fin de l'histoire de Jésus, le dernier mot des Évangiles ?

« Allez, faites de toutes les nations mes disciples ».

Et vous voici.

Longtemps après.

Porteurs d'une parole qui vous porte. Chercheurs d'une parole qui vous cherche[1].

C'est grâce à elle que vous serez le meilleur de vous-même, en donnant le meilleur de vous-même. C'est grâce à elle que vous ferez, de temps à autre, naître ou renaître le Christ autour de vous.

Alors non, vous ne serez pas une race de vipères. Et en plus vous serez heureux.

Continuez donc de faire confiance à Dieu, puisque Lui vous fait déjà confiance…

Jean-paul Morley

Culte des confirmations, 7 juin 2015

[1] Une jolie formule que j’emprunte à Marion Muller-Collard

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